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Le groupe NON-NON s'est formé à Roubaix en mai 2012 autour du projet de mise en musique du film Dementia, découvert six mois avant à Paris par l'un des musiciens. Formé au départ de Louis-Charles Fumery, Aurélien Jablonka et Julian Rivière (parti ensuite vers d'autres directions), la formation s'enrichira d'un batteur, Raphaël Desquilbet, et enfin d'un bassiste Alexis V-ZO.

Les musiciens de NON-NON ont la spécificité d'être tous en premier lieu artistes, anciens étudiants d'écoles d'art et pratiquants réguliers des techniques de la gravure.
Consciemment ou non dans la vision du groupe, sont apparus des parallèles entre la pratique de la gravure et la pratique cinématographique. Dans les deux cas une machine « fabrique » des images, des images dont le statut est particulier : dans les deux cas il s'agit d'une empreinte (projetée, ou pressée) à partir d'une matrice (le film/la plaque de gravure) faisant jouer les ombres ; l'image crée est un multiple, mais malgré tout à chaque fois nouvelle, recrée par la machine révélatrice.
Dans le cinéma comme dans la gravure, quand ils sont pratiqués de manière engagée, il s'agit de combattre la société du spectacle qui détache les images de leur support, ne les prenant pas en compte comme faisant partie de l'œuvre, affirmer la notion d'aura, d'empreinte d'une œuvre d'art, décrite par Walter Benjamin dans « l'œuvre d'art à l'heure de sa reproductibilité technique ». Le groupe ne veux pas par là rendre un hommage réactionnaire à l'ère pré-numérique, à un art mort et désuet, mais bien au contraire souhaite inscrire dans le présent et l'avenir des approches de l'Art qui soient alchimiques, partant du matériau pour le transcender.
Le graphisme et l'univers surréaliste du film n'est pas non plus étranger à l'intérêt que lui ont porté les artistes de NON-NON. S'y ajoute l'incongruité, la bizarrerie, et le caractère inclassable et subversif de Dementia, film a cheval sur plusieurs esthétiques et époques du cinéma.
En outre, le travail des quatre artistes sur Dementia débouchera en parallèle sur un travail plastique et graphique, visible notamment dans l'édition du DVD.
L'approche de la nouvelle orchestration du film -et les choix d'instrumentation, reflètent bien la diversité des gouts musicaux des membres du groupe. Malgré, pour la majorité d'entre eux, une prédilection globale pour le rock, les musiques froides, dures et étranges -se prêtant particulièrement à une approche actuelle de Dementia. Les influences musicales de NON-NON vont du Jazz à la musique industrielle, en passant par le grunge, le doom, la musique classique, le folk, ou simplement la musique de film.
Enfin, cette orchestration, suivant d'assez près la narration du film, passe par les différentes manières d'accompagner musicalement un film : la « musique de fosse » traditionnelle -musique « d'ambiance » se superposant au film, la « sonorisation » du film -et notamment de certains bruitages, et même la « musique source » -musique diégétique, c'est à dire une musique dont la source est présente dans l'image, et audible par les personnages, comme c'est le cas dans la scène du club de jazz. L'on retrouve cette ambiguïté dans les instruments utilisés, comme le theremin ou la guimbarde, dont la pratique se situe entre la musique et le bruitage. Mais aucun des membres du groupe n'ayant un niveau musical « professionnel », l'approche de la mise en musique du film est principalement performative, destinée « au live ».
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